Ré-écoutez l’entretien avec Alexandre O’Toole, chef-opérateur et Benoît Duvette, réalisateur du court-métrage « Ruines » dans un reportage radio diffusé mercredi 8 août 2018 sur Radio Club, un reportage réalisé par Joris Naessens pendant le tournage !
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Retranscription du reportage, illustrée de photographies de tournage :
Jeudi 5 juillet, 20 heures, une activité inhabituelle dans la forêt domaniale de
Raismes-Saint-Amand-les-Eaux-Wallers. Une équipe de tournage a investi cet
espace naturel en plein cœur du Hainaut. Le réalisateur pluridisciplinaire Benoît Duvette et son équipe ont installé leurs équipements, décors et loges à la maison forestière de Bassy. L’artiste réalise son deuxième court-métrage d’une quinzaine de minutes, Ruines, l’histoire d’une fugue de deux adolescents qui découvrent au milieu de la forêt une voiture abandonnée. Avant de
tourner ses premiers plans, Benoît Duvette revient sur la préparation du
tournage :
« J’ai commencé à écrire le scénario il y a environ deux ans, puis il m’a fallu le temps de regrouper les financements, l’équipe technique, de faire les repérages, le casting et d’être certain de l’aventure ! Ça nous a pris tout ce temps pour en arriver là aujourd’hui ! »
Pourquoi le valenciennois ?
« C’est vraiment un choix de décors, c’est à dire que je cherchais pour ce court-métrage une forêt de pins et il s’avère que lorsque l’on prend l’autoroute pour aller de Lille à Valenciennes, on traverse cette forêt de Raismes-Saint-Amand-les-Eaux-Wallers et en bord d’autoroute pour ceux qui sont attentifs on y voit effectivement des pins. J’avais envie de venir voir ce qu’il se passait dans cette
forêt et j’ai découvert la maison forestière de Bassy au beau milieu des pins et je me suis que ce serait le un très bel endroit et un endroit très pratique pour le tournage. »
« L’histoire se passe principalement de nuit et j’avais envie d’une ambiance avec des pins qui viendraient créer quelque chose de très joli et doux. C’est un film qui parle aussi de la matière : il y a une attention sur sur le textile, sur la matière de la terre et des fougères, sur la douceur… Ça parle de ces choses là et aussi de la couleur, de la couleur verte, ses teintes, ses nuances. »
« On est une équipe d’une trentaine de personnes à peu près, c’est variable en fonction des jours et il s’agit d’une équipe professionnelle qui travaille à mes côtés, j’en suis très heureux. C’est important d’avoir une équipe sur laquelle on peut compter, avec laquelle on peut avancer et qui nous écoute, qui est très attentive et concentrée sur le projet… surtout quand on tourne de nuit ce n’est vraiment pas évident, dans un milieu forestier, avec les moustiques qui nous
attaquent ! »
Tout peut devenir beau si l’on porte un regard dessus, c’est la devise du cinéaste qui tourne dans la forêt mais aussi au plan d’eau du pAarc à Gravelines.
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Parmi l’équipe technique, Alexandre O’Toole qui a travaillé avec Golden Moustache et Les Visiteurs du Futur. Il est chef opérateur, responsable de la mise en oeuvre du cadre et de l’image et il explique les échanges avec le réalisateur pour concevoir ce court-métrage :
« C’est surtout un truc qui se fait en amont lors des repérages, des lectures… et c’est un travail de concert entre entre lui et moi. On discute à la fois de la narration, de ce qu’on veut dire, de ce qu’on veut montrer, de ce que lui veut transmettre. Toute une partie de la discussion concerne l’artistique, les ambiances, les couleurs, le cadre… Et après on a une dernière discussion qui est plus d’ordre technique : découpage technique, mouvements de la caméra, placement des comédiens par rapport à la caméra.
Comment vous échangez ? Avec des références de certains cinéastes ?
« On fait un moodboard au départ et on utilise beaucoup de références, des
photos, des films. Après ça peut être aussi des références sonores, des musiques ou même des bouquins. »
La difficulté principale est que ça tourne en extérieur, dans la forêt et aussi juste à côté de la marre à Goriaux, c’est difficile pour l’image, pour la lumière ?
« Les difficultés sont surtout liées à la nuit, parce qu’éclairer des nuits c’est
toujours un peu plus gourmand en ressources humaines, en matériel, en
électricité, et après effectivement il y a juste la variable du climat. Là on ne
contrôle pas, il faut réagir en fonction aussi des aléas, de la pluie et du
soleil. C’est aussi une lutte pour maintenir les raccords, que les plans soient raccord de l’un à l’autre en fonction de la météo et du temps qui passe… »
Comment éclairer la nuit dans ce film ? Quels moyens sont utilisés ?
« On a des moyens tout à fait traditionnel en lumière de cinéma, on est principalement avec du HMI et de la lumière LED. La principale problématique ici c’est pour l’électricité : donner du courant et le dispatcher sur tous les décors. Les distances ici sont très grandes et très étendues. »
Pourquoi avoir choisi de travailler sur ce court-métrage en tant que chef-opérateur ?
« Je ne connaissais pas Benoît avant que l’on me propose ce film et j’ai choisi ce film parce que ça me plaisait, parce qu’on s’entend bien avec Benoît. C’est très important de choisir un projet avec qui on a des atomes crochus. Je fais peu de courts-métrages, j’ai choisi celui-là car je trouvais le pitch intéressant, le décor et l’histoire me plaisaient »
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Benoît Duvette prépare une de ces séquences pour son nouveau film produit par le Collectif des Routes, soutenu par Pictanovo et l’association OVNi. À l’écran les comédiens Simon Royer et Paul Lecomte incarnent les adolescents.
« Je suis très content de mes acteurs, qui plus est parce qu’on travaille avec un jeune garçon qui n’est pas comédien à la base. Il se laisse vraiment guider et il est très à l’écoute, très concentré. Il fait un excellent travail. Je suis toujours très proche d’eux surtout parce qu’ils sont un peu plus jeunes que le reste de l’équipe, il peuvent facilement se laisser impressionner. Je suis très attentif à eux, à leur confort, bien-sûr comme à celui de mon équipe technique. De façon générale, je les guide beaucoup et on a est aussi énormément répété. C’était très important. Quand on est sur le tournage, on a très peu de temps pour les acteurs parce que les équipes techniques nous prennent beaucoup de temps, nous posent beaucoup de questions, veulent vraiment être précis et généralement les acteurs, on a besoin de les voir en amont, de répéter, d’être en
confiance, de travailler… Et c’est ce qui fait que sur le plateau, ils se sentent à
l’aise. Ils sont très bien dans la lumière, ils n’ont pas peur, on les fait aller dans les fougères, dans l’eau : c’est un environnement particulier ! Si on arrivait sans avoir répété, ils auraient pu être impressionnés et moins bon dans leur jeu. »
J’ai vu votre précédent court-métrage Le Corps des Anges, un conte philosophique dans la nature où on se questionne sur l’homme, sur le corps, sur l’existence… Est-ce qu’il y a toujours cette réflexion sur le corps dans la nature avec Ruines ?
C’est présent de façon différente mais c’est toujours présent effectivement. J’ai tenté, dans mon écriture, d’être quand même un peu plus narratif sur ce projet Ruines parce que j’avais besoin d’accompagner un petit peu plus les spectateurs dans une histoire, j’avais besoin qu’ils puissent apprécier mon travail d’un point de vue narratif… Mais à l’image, esthétiquement, je travaille toujours le corps dans la nature d’une façon très douce et très équilibrée, c’est effectivement une thématique ou une esthétique qui m’est très importante.
Qui se retrouve aussi dans les formes, j’ai vu votre préparation pour le tournage vous faites attention vraiment aux cadres, aux paysages et notamment avec ce plan d’eau ici à la marre à Goriaux…
« J’ai effectivement l’œil partout. C’est moi qui ai aussi préparé les costumes
c’est moi qui ai fait attention à un tas de détails, pour moi c’est très important d’avoir un œil à tous les endroits. Je me définis comme un artiste pluridisciplinaire et donc le cinéma c’est une façon de faire mon travail mais j’en ai effectivement d’autres et c’est pour cette raison que sur le plateau de cinéma, je ne me comporte pas toujours qu’en réalisateur mais un petit peu en tout un tas de personnes, ce qui peut parfois surprendre les équipes mais ça fait partie du jeu et en même temps je pense que ça apporte un vent créatif à plein d’endroits. »
Inspiré par la littérature de Mathieu Riboulet, des tableaux, des photographies et l’affiche du film l’Ornithologue de João Pedro Rodrigues, Benoît Duvette a tourné son film Ruines dans la forêt de Raismes-Saint-Amand-Wallers une bonne partie de la nuit. Vous pouvez retrouver ce réalisateur sur son site internet www.benoitduvette.collectifdesroutes.fr
Ce reportage a été réalisé par Joris Naessens de Radio Club. Cette émission est proposée dans le cadre des productions coopératives des radios associatives du nord de la France. Une coopération qui a reçu le soutien de la région Hauts-de-France.
Photographies : Rémi David / Photographie d’équipe : Pauline Le Pichon
© Collectif des Routes – 2018